14.5.16

Episode 113: Des traditions rompues


Odin se leva avec une drôle de sensation au fond du ventre. La journée s'annonçait très spéciale, il avait du mal à croire qu'il était officiellement entré en phase de conception avec Maëva, et que leur première séance était aujourd'hui. Il avait pris rendez-vous en fin de matinée, ce qui signifiait qu'ils ne devaient pas tarder à se rendre au bâtiment principal de l'île, là où on les recevrait. Le jeune homme se sentait légèrement stressé, parce qu'il n'avait pas totalement compris toutes les explications de son épouse.

Ils se rendirent tous les deux dans la salle de bains, et commencèrent leur toilette par un brossage soigneux de leurs dents. Il se regarda dans le miroir, il ne se sentait pas particulièrement en forme, mais pas non plus de quoi se sentir malade. Une journée comme les autres, en somme. Sauf qu'il allait entrer dans une machine, et puis, pouf. Il serait papa. Juste comme ça. La paternité ne l'effrayait pas, mais cette manière de concevoir un enfant lui semblait... non naturelle.

''Tout se passera bien, lui assura Maëva en croisant son regard interrogateur. Normalement, nous n'avons pas besoin de plus de deux séances, et encore ! Pour un seul enfant, une seule séance suffit !''


Elle lui avait dit cela avec une telle joie, qu'il lui avait ensuite semblé entendre : c'est pas comme s'il avait fallu avoir une partie de jambes en l'air, on en aurait eu pour plusieurs nuits !

Elle avait ensuite fait couler un bain, où ils entrèrent tous les deux ensemble. Il lui frotta le dos et les épaules avec l'eau mousseuse, c'était le seul moment où elle avait bien voulu lui accorder le spectacle de sa peau nue. Elle ne trouvait pas ses caresses désagréables, mais ils n'avaient plus reparlé de leur nuit de noces depuis le lendemain de leur mariage. Il ne savait pas ce qu'elle pensait de toute cela, si elle avait changé d'avis ou non... Et il devait s'en contenter. Il essayait de se retenir, comme le lui avait conseillé son père, mais c'était difficile, d'autant plus lorsqu'elle se déshabillait sous son nez, incapable de voir qu'elle éveillait en lui un désir bien enfoui.

''Veux-tu que je te frotte le dos aussi ce matin ? Demanda-t-elle avec un joli sourire de jeune fille.
-Oui... Oui, je veux bien ! Acquiesça-t-il.''


Il n'aurait pas dit que leur relation sonnait faux, mais il était clair pour lui qu'une certaine distance de sécurité s'était établie, et il le regrettait amèrement.


Cela ne l'étonnait pourtant pas, c'était ce qui devait inévitablement arriver, quand il s'empêchait chaque jour, chaque heure et chaque minute de lui montrer combien il la désirait. Il commençait à croire que le jour où il pourrait la posséder pleinement n'arriverait jamais.

Il lui arrivait aussi de penser qu'il n'était qu'un rustre complètement obsédé par ses propres petites affaires. Après tout, dans un couple, on devait respecter les envies de chacun... Il se prenait cependant à penser que le vrai désir de Maëva n'était pas vraiment de rester vierge toute sa vie, elle avait simplement peur de l'inconnu. Il s'était beaucoup remis en question, lui et ses connaissances du monde, et il était parvenu à la conclusion que quelque chose clochait sur l'île, qu'on ne pouvait décemment pas en venir au fait que les enfants devaient être conçus par machine, et non plus par amour.

''Es-tu prêt ? Demanda-t-elle en s'approchant de la porte d'entrée.
-Prêt ! Allons-y ! Allons faire cet enfant...''


Il se retint d'ajouter : puisque c'est ainsi qu'il faut le faire...


Ils arrivèrent un peu en avance, et Odin remarqua que le rendez-vous avait lieu dans le bâtiment même où il avait vu le grand écran central de l'île, où ils avaient organisé leur mariage, et là où ils avaient dansé jusqu'au bout de la nuit... Ce bâtiment réservait décidément bien des surprises.

La jeune femme lui prit la main, et ils montèrent ensemble plusieurs marches d'escalier. Ils s'arrêtèrent à un étage qui semblait complètement vide, et patientèrent sur un fauteuil rouge.

''Voilà, c'est ici, fit-elle.
-Que doit-on faire ?
-Il faut attendre qu'on nous appelle, comme ça nous pourront signer la feuille de présence. C'est important pour savoir quels sont les couples qui sont entrés en phase, et lesquels ne sont plus tenus de venir se reproduire... Normalement, il faut minimum deux enfants par couple, pour atteindre le seuil de renouvellement.''

Il hocha la tête, cela lui semblait être des données bien trop scientifiques pour un simple bébé.

''Maëva et Odin Losti ? Appela-t-on.
-Oui !''


La jeune femme bondit sur ses pieds, et son mari la suivit : ils signèrent un registre, et entrèrent dans une grande salle, dont il avait hâte de connaître le contenu.


Quand la porte se referma derrière eux, il resta un moment sur le seuil, à observer la salle. De grands lits aux formes arrondies se tenaient dans la pièce : il n'en compta pas moins de cinq.

''Voici les lits de reproduction, l'informa Maëva.
-Nous devons... nous allonger là-dedans ?
-Tout à fait !
-Pourquoi autant de lits ? J'imagine qu'un seul nous suffira amplement... pour ce que nous allons en faire...
-Il peut y avoir plusieurs couples en phase de conception à la fois. Dans ces cas-là, chacun se retrouve avec son lit. Durant toute notre phase, notre lit sera celui-ci !''

Elle pointa du doigt celui qui se trouvait au milieu.

''Il a été spécialement programmé avec notre code génétique, mais ne peut bien sûr pas fonctionner si nous ne sommes pas là.''


Elle prit place sur le lit, redressa un peu son oreiller, et s'assura que le matelas était bien confortable.


''Viens ! Lui dit-elle en le voyant hésiter. Tu dois toi aussi venir t'allonger près de moi.
-D'accord.''

Lentement, il passa de la position debout à assise. Le lit était plutôt moelleux, et pas inconfortable du tout. Il se demandait pourquoi ils avaient investis dans un tel mobilier, alors qu'ils n'allaient rien y faire d'autre que de rester allongés.


Il prit une longue inspiration, puis expira tout aussi longtemps. Il avait l'impression de ne pas être à sa place. Qu'était-il en train de faire... ? Ce n'était pas ce qu'il avait imaginé. Il avait pensé épouser une femme qu'il aurait aimée de tout son être... Certes, il aimait Maëva. Mais il ne pouvait pas dire qu'il pouvait le lui montrer comme il aurait voulu. Il s'était aussi dit qu'ils auraient des enfants, un ou deux, et qu'ils les auraient conçus d'amour, peut-être sur une plage ou sur un bateau. Ce n'était ni l'un ni l'autre, l'amour n'entrait absolument pas en jeu dans ce qu'ils allaient faire. Elle ne parlait que de reproduction, de population et de seuils à franchir pour être dans la normale. Était-ce vraiment là la vie dont il avait rêvée ?


Quand il se tourna vers elle, elle commença à lui expliquer comment tout allait se passer.

''Voilà, nous avons juste à rester allongés comme ça, sans bouger.
-C'est aussi simple que ça ? Demanda-t-il en levant un sourcil.
-J'ai juste à lancer le programme de reproduction ! Ensuite, un dôme nous recouvrira tous les deux, et la machine fera son travail.
-C'est à dire... ?
-Eh bien, c'est un peu compliqué. En fait, des milliers de canaux se trouvent sous les tissus de ces lits. Grâce à notre technologie, ces canaux vont pouvoir capter nos cellules et les mettre en contact. Lorsque l'une de mes cellules aura été fécondée, il ne restera plus aux canaux qu'à me réimplanter cette cellule en l'envoyant dans mon corps... Tu vois, c'est sans douleur, pour toi comme pour moi ! Et le taux de réussite est de quatre vingt dix pour cent, c'est très élevé !''

Il hocha la tête, peu impressionné par ces chiffres.


''Es-tu prêt ? Demanda-t-elle, impatiente de commencer.''


Intérieurement, il ne se sentait pas du tout prêt, il se demandait toujours comment quelqu'un pouvait avoir envie de faire un enfant de cette façon... Surtout quand on connaissait les bénéfices de la proximité du corps. Il n'arrivait toujours pas à le lui avouer cependant, et il acquiecça.

''Très bien, je démarre le programme alors ! Dit-elle en faisant apparaître un écran holographique.''

Odin y jeta un œil, mais il ne comprenait pas très bien tout ce qui était écrit, et la jeune femme tapotait dessus à toute vitesse.

''Nous n'y avons pas vraiment réfléchir, mais... veux-tu un garçon, ou une fille ?
-Pourquoi ça ?
-Eh bien, je dois l'inscrire dans le programme. Comme ça nous pouvons décider nous-même du sexe de notre enfant.''

De mieux en mieux, pensait Odin ! Quelque chose commençait à le démanger de plus en plus fort, comme une sorte de bête enfermée en lui-même, qui ne demandait qu'à sortir.

''Mais tu ne peux pas faire une telle chose ! Rétorqua-t-il.
-Oh, mais si, regarde là sur l'écran...

-Ce n'est pas de ça que je veux parler ! Fulmina-t-il.''


Maëva sursauta, surprise par la colère soudaine dont il faisait preuve. Il se redressa et se mit assis sur le bord du lit.

''Mais qu'est-ce que tu fais... demanda-t-elle d'une petite voix.
-Alors pour toi, avoir un enfant c'est juste un moyen de suivre un programme informatique ? Et tu le fais parce qu'on te l'a demandé, que tu n'oses pas dire non ?
-Mais, c'est écrit que nous devons...
-Non Maëva ! Je refuse ! Tu m'entends, je refuse de faire un enfant dans ces conditions ! Je pensais que je serai capable de faire des efforts pour toi, mais ce n'est visiblement pas le cas ! Je ne peux pas ! Si je dois avoir un enfant, c'est parce que toi et moi en avons envie, et pas parce qu'un stupide programme de reproduction a été établi pour que l'île continue de prospérer ! C'est complètement idiot !
-Mais si nous ne le faisons pas, nous finirons par disparaître ! Plaida-t-elle.
-Je m'en fiche complètement. Si tu ne conçois pas ton enfant dans l'amour, je ne vois pas comment tu peux l'élever et l'aime au mieux ! Regarde tes parents, ils t'ont laissée alors que tu n'étais même pas encore une adulte !
-Mais ils étaient obligés de partir... ce... ce n'est pas leur faute...
-Qui ? Qui les a obligés ? Réponds-moi !''

Elle avait détourné le regard, gênée.


''Je... Je ne sais pas... C'était écrit sur l'écran central, voilà tout...''


Odin leva les yeux au ciel, et se leva complètement.

''Odin ! Où vas-tu ?! Fit-elle d'une voix désespérée.
-Je m'en vais.
-Non ! Tu ne peux pas !
-Bien sûr que si, je peux.''

Il lui tourna le dos, et sortir de la pièce en claquant la porte. La jeune femme se mordit les lèvres, au bord des larmes. Elle avait tant redouté qu'il s'en aille avant la fin de la procédure, et elle avait eu raison. Pourquoi ne pouvait-il pas voir les bienfaits de leur technologie ? Paraissait-elle si absurde aux yeux d'un étranger... ?


Elle se redressa et se mit à courir derrière lui pour le rattraper. Voilà qu'il chamboulait tout à nouveau : non seulement sa vie toute tracée, mais aussi les croyances en lesquelles elle avait toujours eu foi, jusqu'à ce qu'il débarque sur cette île. Elle commençait à se poser des questions qui la dérangeaient, et dont elle ne comprenait pas le sens : qui diffusait ces messages sur l'écran central ? Qui définissait les lois et les coutumes, les migrations ? Qui était à l'origine de tout cela... ? Elle devait se rendre à l'évidence, elle ne savait pas. Ce qu'elle savait, en revanche, c'était qu'elle aimait profondément son mari, et qu'elle ne voulait pas le perdre.


Quand enfin elle fut à sa portée, elle lui attrapa la main et le supplia.

''Odin je t'en prie, ne t'en va pas ! Je ne veux pas que tu t'en ailles, mes sentiments envers toi ont toujours été sincères !
-Les miens aussi, répondit-il, et c'est pour ça que je veux que tu me fasses confiance.
-Mais... Je t'ai toujours fait confiance, Odin.
-Non, ce n'est pas vrai. Tu le sais, n'est-ce pas ?''

Elle baissa les yeux, le cœur battant. Il lui releva cependant rapidement la tête, et déposa un baiser brûlant sur ces lèvres.

''Tu n'as pas idée comme je t'aime Maëva, mais quand je vois à quel point on vous cache certaines vérités sur cette île, ça me fait souffrir. Je pensais être tombé au paradis, mais à présent, j'en doute...''

Elle se mit à pleurer, doucement. Ses paroles étaient dures, et terminaient de briser chacune de ses convictions.

''Pourquoi... Pourquoi est-ce que tu me dis tout ça... dit-elle en pleurant.

-Parce que je ne crois pas qu'on puisse vivre dans une prison dorée comme la tienne... quand bien même cela te ferait souffrir. Avoir mal nous aide à grandir.''


Il la souleva, la serra entre le mur et lui, et l'embrassa à nouveau. Il la sentit trembler sous ses gestes furieux et désemparés. Il n'avait jamais voulu lui dire ce qu'il avait sur le cœur de cette manière, mais avait-il eu le choix... ? On était parfois obligé d'employer la manière forte pour faire passer ses idées. Il sentait son impatience se faire de plus en plus visible, au fur et à mesure qu'il l'embrassait avec plus de violence.

''Je t'en prie... la supplia-t-il à son tour. Laisse-moi... Laisse-moi te montrer...''

Elle secoua négativement la tête une nouvelle fois, prête à fondre en larmes une nouvelle fois.

''C'est impossible Odin...
-Pourquoi ? Ce n'est pas aussi terrible que tu le crois... Je ne veux pas te faire mal, je veux te montrer les joies que cela procure...
-Tu n'es pas une femme, tu ne peux pas savoir...
-Crois-tu donc que je ne sois pas né de l'amour ? Penses-tu que ce sont des cris de douleur qui s'échappent de temps en temps de la chambre de mes parents ?''


Il eut un rire gêné à l'évocation de cette vision qu'ils avaient eue un beau jour, en passant devant chez Joss et Azalée.


Ils rentrèrent à l'intérieur, et il emmena la jeune femme jusque dans la chambre. Elle se laissa porter, le visage au creux de son épaule, le visage plein de réflexions. Voilà qu'il continuait de détruire chacune de ses pensées... Quand elle pensait avoir raison, il lui démontrait qu'elle avait tort. N'y avait-il pas une seule chose dans ce monde dont elle pouvait dire qu'elle avait raison ?

Les baisers furieux du jeune homme était redevenus tendres et doux, et elle ferma les yeux quelques minutes pour mieux profiter de cet instant. Quand elle les rouvrit, elle vit son regard interrogateur. Il attendait un geste, un mot qui pourrait lui donner le feu vert. Elle savait pertinemment que sans ça, il ne tenterait rien.

''Comment sauras-tu ce qu'il faut faire... Tu m'as dit toi-même que tu ne l'avais jamais fait...
-Il paraît que c'est naturel, qu'il n'y a pas besoin de se forcer...
-Et si on tombait malade...
-Il n'y a aucun risque entre deux personnes aussi saines que toi et moi.''

Elle lui caressa la joue, un peu plus détendue, mais il voyait que quelque chose continuait de la tracasser. Elle poursuivit :

''Et si j'ai mal...''

Dans une société où toute douleur avait été proscrite depuis bien longtemps, Odin comprenait que cela puisse lui faire peur. Depuis le début, il n'arrêtait pas de chambouler son quotidien, et elle devait être complètement perturbée.


''Tu n'auras qu'à me le dire, et on arrêtera.''


Elle se contenta de lever la tête vers lui, et de l'embrasser tendrement. Il était rare qu'elle prenne des initiatives, et cela lui faisait d'autant plus plaisir après la conversation qu'ils venaient d'avoir. Il ne voulait pas précipiter les choses, même si son cœur de jeune homme pressé lui disait le contraire. Cette première fois devait prouver à son épouse qu'elle se trompait sur toute la ligne... Il respira profondément. Ce n'était pas non plus une bonne idée de se stresser à ce sujet, il risquait de tout rater... Cela se passerait comme cela devait.

Il la laissa un peu respirer, et répondit avec ardeur à son baiser. Il la sentit se détendre petit à petit sous son poids, et il se sentit lui-même un peu plus à l'aise.

''Tu es sûr... que ce que nous faisons est bien ? Demanda-t-elle une dernière fois.
-Absolument. Et tu sais pourquoi ?
-Pourquoi ?
-Parce que je t'aime.''


Cette fois-ci, il avait complètement abattu chacune des barrières qui auraient pu empêcher la jeune femme de s'offrir à lui : elle ne lui opposa plus aucune résistance.


Délicatement, il la déshabilla pour la seconde fois de sa vie. Il prit le temps d'observer ses gestes, de voir son corps répondre à ses demandes. Si elle semblait farouche et timide, il arrivait pourtant à ses fins, et elle fut bientôt nue devant lui. C'était autre chose que de prendre un bain, où la plus grande partie de son corps étaient entièrement cachée par la mousse. Comme elle ne bougeait, il lui prit les mains.

''Toi aussi, tu peux me toucher, et m'enlever mes vêtements...''

Elle hésita, puis tendit les mains vers lui. Elle toucha son visage, de son front jusqu'à son cou, puis ses épaules, ses bras, et à nouveau ses lèvres. L'homme qu'elle avait épousé étant certainement le plus beau qu'elle ait jamais rencontré, et elle s'émerveilla un long instant de découvrir chaque parcelle de son corps : elle n'aurait jamais pensé pouvoir l'observer dans le plus minime des appareils. Quand il embrassa sa poitrine, une multitude de frissons lui parcourut la peau, et il ne put s'empêcher de le lui faire remarquer.

''Tu vois, pour le moment ça ne fait pas mal...''


Elle se sentait déjà les joues en feu, et ne parvint pas à lui répondre.


Puis, Odin ne tarda pas à la renverser sur le dos à nouveau, et à l'embrasser par tout. Il avait de plus en plus de mal à se contrôler, mais il savait qu'il ne pouvait pas penser uniquement à son propre plaisir, et que ce que la jeune femme pouvait ressentir allait jouer un rôle décisif pour l'avenir de leur couple. Pourtant, il fallait bien passer à l'acte à un moment donné, et quand il la sentit prête à l'accueillir, il le lui murmura à l'oreille.

''Je vais venir, d'accord ?''

Elle acquiesça presque silencieusement dans un gémissement, et il la souleva légèrement du lit. Puis elle sursauta. Se tendit tout à coup sous le poids de son mari, trembla sous ses gestes. Elle sentit son visage en particulier se crisper, et cela dura un instant : une étrange douleur se faisait ressentir dans le bas de son corps, et elle attendit de voir ce qui allait se passer.

''V... Voilà, bégaya le jeune homme.''

Elle se détendit à nouveau quand il lui embrassa le cou. Elle sentit qu'elle n'avait pas été la seule à se crisper, et elle se rappela que l'inexpérience de son mari devait peser sur ses épaules, parce qu'il voulait être doux, et qu'il... oui, elle comprit qu'il voulait lui faire partager une première fois exceptionnelle, mais qu'il ne savait pas comment.


Ses mouvements étaient lents, et une étrange chaleur se répartissait dans chacun de leurs deux corps.


Maëva se détendit alors complètement, elle avait encore un peu mal, mais la douleur semblait s'éloigner au fur et à mesure que le temps passait. La chambre, qui avait été étrangement calme jusqu'à présent, s'emplissait de bruits qu'elle n'avait connus auparavant. À son oreille, elle sentait le souffle rauque d'Odin : elle ne savait pas pourquoi, mais tout son corps semblait y réagir.

Il n'y avait pas que ça non plus. Ses mouvements, ses baisers, la moindre de ses caresses ou de ses paroles lui procuraient d'étranges sensations, et elle se rendit compte qu'il n'y avait absolument rien de désagréable, et qu'au contraire, un plaisir naissait au creux de sa plus profonde intimité.


Bientôt, son souffle se mêla à celui du jeune homme, et elle eut des réactions incontrôlées : sa main qui se crispait sur les draps, par exemple. Quelques cris. Des paroles encourageant Odin, qui lui semblaient complètement insensées, et qu'elle n'aurait jamais cru prononcer un jour.


Odin saisissait chacune de ces images au vol. Il ne voulait rien oublier. Il ne voulait rien laisser s'échapper, et souhaitait enfermer chacun de ces instants dans une petite boîte, qu'il aurait ensuite pu ouvrir à volonté, pour contempler encore et encore ce visage heureux, ces yeux bleus intenses.

La chaleur grimpa si haut, qu'il fallut bien redescendre. Le septième ciel s'était trouvé bien haut ce soir-là, et le chemin pour y parvenir n'avait pas été de tout repos. Mais ils y étaient monté, ils devaient maintenant revenir tout en douceur.


Quelques caresses supplémentaires leur fit recouvrir leurs esprits. Le jeune homme dégagea le visage de son épouse de mèches de cheveux collées et mouillées de sueur. Alors il s'éloigna légèrement d'elle pour la contempler. Elle reprenait lentement sa respiration, ne sachant pas vraiment d'où elle revenait. Elle croisa son regard, puis, soudaine, se jeta à son cou et pleura.


Il la serra contre son torse jusqu'à ce qu'elle puisse sécher ses larmes, et ils se glissèrent sous la couverture. L'après-midi n'était pas encore terminée, et le soleil brillait par la fenêtre, mais ils n'avaient ni l'un ni l'autre envie de sortir de ce lit si confortable, et à présent rempli d'amour.

Maëva n'osait rien lui dire, et Odin respecta son besoin de silence. A quoi pensait-elle ? Il ne pensait pas avoir été si mauvais que cela, et ses pleurs ne lui avaient pas semblé être de tristesse. Pleurait-elle de joie ? Comme si elle avait lu dans ses pensées, elle lui murmura un merci au creux de l'oreille.

''Merci à toi, de m'avoir fait confiance.''


Elle approuva, et se lova tout contre lui. Si cette première fois les unissait à jamais, cela posait cependant de nouvelles questions auxquelles ils n'avaient pour l'instant plus envie de réfléchir : y-avait-il un maître de l'île, et qui était-il ?


2 commentaires:

  1. Je suis d'accord avec Odin, cette façon d'avoir des enfants est pas naturelle, c'est même assez glauque, ça enlève la beauté de la découverte de la grossesse, pire encore, de la naissance, puisque tous les paramètres sont déjà sélectionnés. Et puis du coup ils semblent faire des enfants juste parce qu'il le faut et non pas par véritable envie. Alors j'attends toujours de pied ferme le moment où l'on découvrira ce qu'il se passe vraiment sur cette île, je suis de plus en plus curieuse.
    Heureusement que Maëva a fini par entendre raison, leur relation sera plus belle maintenant

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    1. Les secrets de l'île, ce n'est pas pour toute de suite, tu as le temps de mijoter encore un peu! :) Mais effectivement, jusqu'à présent, les enfants c'était uniquement par devoir...!

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